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  • La psychométrie au service du capital humain

    Cet article est l’extrait d’un Avis d’experts publié initialement dans le magazine marocain Richesses Humaines de l’AGEF.
    Par Jérôme Iborra, Responsable marché de Pearson TalentLens et Ghizlane Riachi, Directrice Générale Adjointe de TTI Success Insights Maroc

    Utilisés par la majorité des grandes entreprises, les tests psychométriques offrent un accompagnement de plus en plus pertinent au développement du capital humain. Ghizlane Riachi, Directrice Générale Adjointe de TTI Sucess Insights Maroc, et Jérôme Iborra, Responsable marché de Pearson TalentLens, livrent leur regard sur les usages, les enjeux et les limites de ces données dans le monde de l’entreprise.

    Sollicitée depuis de nombreuses années par les entreprises internationales, la psychométrie est une branche de la psychologie qui utilise les tests pour mieux comprendre les capacités cognitives d’une personne, ainsi que sa personnalité et ses tendances comportementales. L’intérêt de cette approche est d’obtenir des résultats objectifs qui permettent d’évaluer l’adéquation entre un collaborateur ou un candidat et un poste ou une mission. En effet, contrairement à des aspects tels que l’éducation, le savoir-faire ou l’expérience, les traits de comportement et la personnalité sont difficiles à mesurer dans le cadre professionnel.

    Au-delà du métier, l’humain

    Les tests psychométriques apportent une dimension plus humaine à l’évaluation des profils : au-delà des diplômes et des savoir-faire techniques, il est également possible de tenir compte du savoir-être. (…) Pour Jérôme Iborra, Responsable marché de Pearson TalentLens, les tests « constituent des solutions de professionnalisation des pratiques, pour mieux identifier, mesurer et comprendre les ressorts psychologiques et la dynamique [des] collaborateurs ou collaboratrices dans leur environnement professionnel ».

    Aide au développement du capital humain

    Pour évaluer les compétences comportementales, il existe différents outils qui contribuent à mieux comprendre l’individu à travers sa personnalité, son style relationnel, ses motivations, sa façon de prendre des décisions. (…) Selon les besoins de l’entreprise, leurs élaboration intègre des tests et surtout des questionnaires, dont les réponses ne sont pas bonnes ou mauvaises mais consistent seulement à mieux comprendre le fonctionnement de l’individu en vue de le placer dans les meilleures conditions de travail possibles.

    Une démarche globale

    L’une des clés de réussite de la démarche réside donc dans la bonne conception de l’outil : « il est indispensable de bien identifier les besoins, les attentes, et les problématiques pour lesquelles ils seront utilisés », précise Jérôme Iborra. En effet, les applications de l’approche psychométrique sont nombreuses et il est important de bien définir les objectifs pour l’utiliser efficacement : recrutement, fidélisation, mobilité interne, amélioration du climat de travail, formation, coaching, etc.
    Une fois les tests passés, les résultats doivent être bien interprétés et le diagnostic doit donner lieu à des recommandations de la part des professionnels. Pour être bénéfique, la démarche doit déboucher sur un plan d’actions individualisé et, idéalement, sur une phase d’accompagnement des individus concernés. Ainsi, l’outil est réellement pertinent lorsqu’il s’inscrit dans un dispositif global et non pas dans une utilisation ponctuelle. (…)

    Recrutement et intégration

    Parmi les domaines d’application les plus courants, le recrutement bénéficie d’une aide à la décision très utile. En effet, il apparaît que les tests psychométriques réduisent considérablement les risques d’erreur d’évaluation. En complément des entretiens d’embauche et des CV, qui sont de plus en plus uniformisés, ces outils permettent aux recruteurs de mieux connaître la personnalité et les motivations du candidat. Ils font ressortir ses forces et ses faiblesses tout en révélant des points à approfondir lors de l’entretien ou à développer lors de futures formations. (…)
    Pour Jérôme Iborra, il faut également bien « restituer les résultats aux candidats lors d’un entretien, idéalement en face à face, au terme d’un échange respectif nourri. Ils pourront ainsi mesurer à quel point les tests peuvent leur apporter en termes de connaissance d’eux-mêmes et les aider eux aussi dans leur prise de décision. En ce sens, c’est un apport à la fois pour les DRH mais aussi pour les candidats. »

    Former différemment

    La formation professionnelle est également concernée par l’approche psychométrique. Après avoir longtemps donné la priorité aux formations « métiers », les entreprises cherchent de plus en plus à développer les compétences comportementales de leurs collaborateurs. (…)

    Favoriser la cohésion d’équipe

    Très prisés par les concepteurs de team building, les outils psychométriques peuvent aussi jouer un rôle important pour favoriser la cohésion d’équipe. Il s’agit pour cela de concevoir des outils qui s’adressent à plusieurs collaborateurs dans l’optique de renforcer leurs interactions en présentant leurs complémentarités. (…)

    Bien choisir son outil

    Pour profiter pleinement des apports de cette approche, il est important de bien choisir son outil parmi les nombreuses solutions existantes sur le marché. Rappelons qu’un bon test doit être conçu sur mesure, en fonction des préoccupations et des attentes de l’entreprise. D’un point de vue RH, il est important de s’appuyer sur des outils fiables et reconnus. Cette fiabilité se mesure sur la base de deux critères : la validité (il faut que les outils soient validés par des études factorielles) et la fidélité (basée sur le fameux indice alpha de Cronbach). Il faut en effet savoir que les outils psychométriques varient selon le domaine d’action (recrutement, mobilité, gestion d’équipes, résolution de problèmes, etc). (…) Comme l’indique Jérôme Iborra, il faut « s’assurer que les tests ont été validés scientifiquement et présentent des qualités psychométriques satisfaisantes en termes de validité, de sensibilité et de fidélité dans la mesure. Autrement dit, qu’ils soient statistiquement de grande qualité. Des services puissants de Recherche et Développement doivent en conséquence soutenir le développement de ces outils. » (…)

    Les limites de l’approche

    Malgré, l’efficacité très satisfaisante des tests psychométriques, il convient de rappeler qu’il s’agit simplement d’outils d’aide à la décision. Ils ne peuvent donc pas servir seuls de base décisionnelle, et ce quel que soit le domaine d’application. Ainsi, pour un recrutement, ils doivent s’inscrire dans le cadre d’une évaluation globale d’un candidat par rapport à un poste donné. De même, il faut retenir que ces tests n’indiquent pas de bons ou de mauvais profils : si le résultat n’est pas satisfaisant, cela ne veut pas dire que la personne a échoué mais que ses tendances comportementales naturelles seront plus appropriées ailleurs.
    Selon Jérôme Iborra, « il est primordial de bien comprendre que les tests psychométriques viennent confirmer ou infirmer des hypothèses que les professionnels des RH formuleraient sur un candidat au recrutement, à la mobilité, ou dans un tout autre contexte dans lequel ils peuvent être utilisés ». Enfin, ces outils doivent être employés au sein d’une relation de confiance avec les collaborateurs. Ceux-ci doivent comprendre, et être convaincus, que les tests ont une visée professionnelle et ne vont rien révéler de leur intimité. Cette démarche exige dont une grande éthique de la part des entreprises qui veulent en faire une pratique régulière.

    Retrouvez l’intégralité de cet article publié dans le magazine marocain Richesses Humaines de l’AGEF, n°1 daté de décembre 2018, p38-43, rubrique Avis d’experts. Avec l’aimable autorisation d’Amine Oulahyane, son rédacteur en chef.

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  • Politique des Ressources Humaines dans une organisation collaborative

    Par Robert Collart (membre fondateur de Phusis, une coopérative de managers et d’experts de la transformation de grandes sociétés désirant mettre leur organisation sur le chemin de la collaboration, de la responsabilisation, de la liberté et de l’agilité) et Michal Benedick (coach en développement individuel et d’équipes).

    Extrait de leur ouvrage Bâtir une organisation collaborative (Pearson, 2018)

    Quelles stratégies mettre en œuvre si l’on veut placer l’homme au cœur de l’organisation, si l’on veut instaurer une politique des ressources humaines ayant comme objectif la collaboration ?

    Le bien-être des collaborateurs doit être considéré comme l’affaire de tous, et pas uniquement du département ressources humaines. Les managers, mais aussi tous les collègues, doivent prendre leur part d’investissement et de responsabilité dans le développement et le bonheur de leurs collègues. Si un collègue, ou un équipier si l’on fonctionne en cercles ou en équipes autonomes, se sent mal dans sa fonction, le premier soutien doit d’abord venir de ses proches collaborateurs – pas d’un spécialiste des ressources humaines.

    Le département ressources humaines doit par conséquent partager la gestion des ressources humaines. Ses gestionnaires ne doivent plus considérer que c’est à eux de tout faire, qu’il s’agit d’un territoire réservé, mais mettre leurs compétences au service des autres pour que les choses se fassent. Par exemple, le recrutement d’un nouveau collègue peut être mené par son écosystème rapproché, les experts en ressources humaines assurant seulement la présélection des candidats.

    Pour réaliser sa vision, l’organisation, et plus spécifiquement les ressources humaines, n’imposent plus un plan réfléchi en chambre dans lequel les forces vives doivent se forcer à entrer. Au contraire, l’organisation s’appuie sur le réel, c’est‑a‑dire les motivations intrinsèques et les talents de chacun pour faire grandir l’organisation.

    Le management collaboratif est synonyme de déhiérarchisation pour permettre à chacun d’exercer sa liberté d’action et d’assumer ses responsabilités. En effet, il est contradictoire de vouloir à la fois une organisation pyramidale et un fonctionnement collaboratif. Les responsabilités doivent être distribuées, autrement dit les décisions doivent se prendre en équipe au plus près du terrain par ceux qui savent et qui font, pour permettre à chacun de s’engager et d’être responsable. La plupart des organisations collaboratives font le choix de garder une structure hiérarchique mais plus horizontale, ce qui implique pour les cadres dirigeants et le management de proximité la mise en œuvre d’un leadership bienveillant.

    Reprendre le contrôle de sa vie professionnelle est une posture tout aussi essentielle. Généralement, les experts en ressources humaines élaborent des parcours professionnels que les salariés doivent suivre pour progresser le long des échelons hiérarchiques. Il est essentiel que chacun se définisse des parcours individualisés pour redevenir acteur de sa vie.

    Pour aller plus loin :

    L’ouvrage de Robert Collart et Michal Benedick Bâtir une organisation collaborative (Pearson 2018) offre une méthodologie complète et illustrée pour bâtir une organisation collaborative, à tous les étages.

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